L’intervention au Tchad de la France contestable sur le fond et sur la forme
Le mercredi 6 février à 21h30, le Sénat reprenait les discussions sur le projet de loi PACTE. C’est à cette occasion que les sénatrices et sénateurs ont été informés par une brève intervention du Président de séance que l’armée française était intervenue trois jours auparavant au Tchad pour arrêter une colonne de 40 pick-ups.
Si le gouvernement a sur la forme respecté ses obligations légales d’information au Parlement sous trois jours, cette annonce en catimini et au bout du délai imparti interroge sur le fond. Cela est d’autant plus dommageable que le Premier Ministre Édouard Philippe était au Sénat le mardi 5 février après-midi et que l’opération avait eu lieu le dimanche. Se pose alors la question de vouloir réellement informer les parlementaires sur cette action des troupes françaises et sur les raisons d’une telle latence et discrétion du gouvernement alors même qu’il avait toute latitude pour demander un débat au Parlement. Cela participe par ailleurs de la banalisation des opérations armées que mènent la France.
Alors que la France est déjà engagée au Tchad dans le cadre de la lutte anti-terroriste via l’opération Barkhane, la finalité même de l’engagement du dimanche 3 février interroge. Le président tchadien en place depuis 1990, Idriss Déby Itno, est aujourd’hui confronté à une opposition de plus en plus large alors que la situation sociale et humaine dans le pays est de plus en plus difficile. Dans ce cadre, l’opération française semblerait plus être dirigée contre l’opposition tchadienne que contre des groupes terroristes, ce qui fait peser un doute sur sa légitimité et son respect de la non-ingérence dans les affaires internes du pays.
Pour finir, cet épisode démontre une nouvelle fois les conséquences des ingérences répétées ces dernières décennies des pays occidentaux en Afrique, affaiblissant ces États plus que les aidants.
Les sénatrices et sénateurs du groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste regrettent vivement la manière de procéder du gouvernement français et souhaitent engager le débat sur une révision de l’article 35 de la Constitution qui prive aujourd’hui le Parlement de l’exercice de sa mission de contrôle sur l’Exécutif.