72ème anniversaire de la Libération de Nice : Allocution de Philippe PELLEGRINI pour le PCF
Cher(e)s ami(e)s,
Il y a 72 ans, notre pays, notre région notre département, note ville se libéraient.
Depuis plusieurs années maintenant, la Mairie de Nice croit utile de faire défiler à cette occasion des véhicules de collection de l’Armée Américaine dans nos rues. Pourtant, il nous faut encore le rappeler, le 28 août 1944, à Nice, il n’y eut ni Jeep ni Tank US.
La libération de notre ville fut le fait de la résistance elle-même. Un acte qui comme à Paris au même moment ou en Corse dès 1943 faisait entendre la voix d’une France qui voulait reprendre en main son destin et ne pas se voir placer sous tutelle par une administration militaire alliée telle qu’elle était prévue dans les bagages de l’US Army.
Ce 28 août là sonne ainsi la fin de quatre années d’occupation italienne puis allemande.
Quatre années terribles pour une population soumise à toutes les privations et à l’arbitraire de la puissance occupante.
Quatre années où les occupants et les collaborateurs répriment fortement les populations juives et la Résistance.
Juifs, résistants ou simples otages, ils furent près de 4 000 à être déportés. La grande majorité ne reviendra pas.
Après les débarquements en Normandie et en Provence, la répression redouble d’ampleur en cet été 44.
Le 11 juin à St Julien du Verdon, des lycéens du Lycée Masséna sont fusillés.
Le 7 juillet, Thorin et Grassi, FTPF originaires de Gattières sont assassinés et pendus en public à Nice.
Le 11 juillet, Max, fils de Virgile Barel est torturé et assassiné par Klaus Barbie à Lyon
Le 12 août, à Sospel ce sont 15 résistants français et italiens qui sont fusillés.
Le 15 août, l’occupant et la milice exécutent 10 résistants à Cannes et 21 à l’Ariane.
La liste est longue
C’est dans ce climat marqué par la répression mais aussi par l’espoir d’une victoire contre le nazisme que ce décide et s’engage la libération de Nice.
Une libération qui prit naissance dans ce quartier du Passage à Niveau. C’est ici qu’ont éclaté les premiers coups de feu donnant le signal de l’insurrection.
Ce moment qui semble spontané a fait l’objet d’une préparation très active. Alors que depuis 5 ans déjà, les communistes sont dans la clandestinité et que Vichy et la collaboration suppriment les libertés conquises de haute lutte par et pour le peuple, c’est dès le 15 août que l’UD CGT décide le principe de la grève insurrectionnelle. Le 24 août, le comité insurrectionnel est créé, rassemblant FTPF, Milices Patriotiques, Militants communistes. Le même jour se forme un comité d’action FFI.
C’est le 27 août qu’aura lieu au Palais Stella la réunion décisive du comité insurrectionnel qui fixera la date de l’insurrection pour le 28 août.
Les combats dureront toute la journée s’étendant à l’ensemble de la ville et contraindront les allemands au départ.
Nice est libérée. 32 de nos libérateurs tombèrent ce jour-là payant de leur vie leur engagement patriotique et antifasciste.
Ne pas oublier ces dernières victimes d’un long et sanglant conflit qui va durer en Europe encore plusieurs mois signifie également ne pas oublier la source de cette guerre : Le nationalisme, les idéologies qui prônent l’exclusion et le racisme, plus généralement ceux qui voient des civilisations éternelles et supérieures face à d’autres qui ne seraient pour eux que des barbares.
Aujourd’hui, sont au pouvoir dans plusieurs pays d’Europe les héritiers de ceux qui ont permis au nazisme de développer son plan macabre. En Hongrie, en Slovaquie, en Pologne ou en Ukraine et dans les Pays Baltes les nostalgiques du IIIème Reich participent à des gouvernements et certains ont même voté pour que les années passées dans la SS soient validées dans la retraite des anciens combattants. Ils effacent les symboles de la résistance et revisitent l’histoire de leur pays sous un jour ultra-nationaliste. Les oppresseurs d’hier deviennent des héros.
En France, nous n’en sommes pas là mais résister doit plus que jamais se conjuguer au présent. Alors que tous les leurres sur l’identité nationale ou n’importe quelle occasion de stigmatiser l’autre n’échappent pas à la droite et à son extrême, on voit depuis ces dernières années, des mots et des visions qui étaient cantonnés aux groupuscules néo-nazis et au FN dans la bouche de ceux qui se présentent comme « la gauche de gouvernement ». De propos racistes sur les Roms à la déchéance de nationalité, du rejet des réfugiés à la qualification d’une tenue de bain comme étant antirépublicaine, le premier ministre de la France et ce gouvernement se revendiquant de la social-démocratie ont une responsabilité toute particulière dans le glissement très à droite du débat politique français.
Nous, communistes nous n’oublions pas que partout en métropole ce sont des combattants issus de tout l’empire colonial français qui sont tombés pour nos libertés. Des goumiers marocains aux tirailleurs sénégalais, nous savons combien nous devons aux grands-pères de ceux qu’une partie de la classe politique française voudrait aujourd’hui stigmatiser.
Nous n’oublions pas non plus que c’est dans une France exsangue que sont nées les grandes ambitions sociales pour ce pays alors que l’on voudrait nous faire croire aujourd’hui que les 35h ne sont plus viables pour l’économie nationale et que l’on veut réduire à néant le Code du travail, l’hôpital public, l’éducation nationale, etc.
Là aussi, se souvenir de nos glorieux ainés c’est se souvenir du programme du Conseil National de la Résistance et les grandes réformes qui façonnèrent notre société (le statut de la fonction publique, la sécurité sociale, les monopoles publics sur l’énergie et les secteurs stratégiques pour le pays). Ce n’est pas un hasard si aujourd’hui encore le MEDEF veut achever de liquider l’héritage du CNR en démontant pièce par pièce ce qui faisait le modèle social français.
Comment ne pas se révolter quand on entend parler du travail que comme un coût alors que ce que nous devons supporter c’est bien le coût du capital ! Une fraude fiscale des entreprises évaluée à 80 milliards d’Euros, Les affaires Bygmalion, Cahuzac et autre Panama Papers nous montrent que ce n’est pas l’argent qui manque ni les moyens de le dissimuler et de le soustraire à la solidarité nationale.
Les arguments des libéraux sont les mêmes que ceux des propriétaires des champs de coton avant l’abolition de l’esclavage, les mêmes que ceux qui justifiaient le travail des enfants et qui nous expliquaient que la catastrophe ne tarderait pas si l’on avait des congés payés ou un jour de repos hebdomadaires. Les archaïques, les dangereux, les fanatiques de cette nouvelle religion qu’est devenu le marché sont prêts à tout pour leur taux de profits et leurs dividendes : Manipulations médiatiques, coups d’Etat comme au Brésil au Honduras et au Paraguay, et encore et toujours la guerre comme continuation absolue de la conquête de marchés par d’autres moyens. Les richesses naturelles, au lieu d’être des chances, deviennent des malédictions pour les peuples qui habitent à proximité.
Ainsi, gardons ce passé en tête pour nos combats d’aujourd’hui. Nous savons que la Paix ne se construit que sur la justice, l’harmonie et le progrès ne surviennent qu’avec l’égalité. Souhaitons-nous à tous une République qui fasse vivre au quotidien sa devise et les valeurs qu’elle proclame.